Il existait un petit village où la neige était un événement rare. Chaque
Noël, les habitants scrutaient le ciel, espérant voir tomber les premiers flocons,
mais ils se faisaient souvent attendre. Cependant, cette année-là, un hiver
plus froid que les autres enveloppa le village. Au matin du réveillon, le miracle
tant attendu se produisit : une avalanche de flocons dansa dans l’air,
recouvrant le sol d’un épais manteau blanc. Les enfants, fous de joie, se
précipitèrent dehors. Amélia, Léo et Mahée, trois inséparables amis,
décidèrent de construire le plus beau bonhomme de neige que leur village
n’ait jamais vu. Ils roulèrent de gigantesques boules de neige pour lui donner
un corps robuste et une tête bien ronde. Ils ajoutèrent une carotte orange pour
le nez, deux boutons noirs pour les yeux, et enroulèrent une écharpe verte
autour de son cou. Pour finir, ils coiffèrent leur bonhomme d’un chapeau un
peu usé mais élégant. « Il s’appellera Flocon ! » déclara Amélia fièrement. Les
trois enfants s’émerveillèrent devant leur création avant de retourner dans
leurs maisons, attirés par l’odeur du chocolat chaud.
La nuit tomba, et tout le village s’illumina de guirlandes et de bougies
scintillantes. Alors que les familles célébraient le réveillon, une lumière étrange
descendit doucement du ciel et enveloppa Flocon. Une étoile brillante effleura
son chapeau avant de chuchoter : « Joyeux Noël, Flocon. » Et, comme par
magie, il s’anima. Flocon ouvrit les yeux, observa le monde autour de lui, et
ressentit pour la première fois le vent glacé, la douceur de la neige sur ses
joues et la chaleur réconfortante de son écharpe. Mais bientôt, il entendit les
rires et les chansons qui résonnaient dans les maisons. Il vit les familles
réunies autour des sapins et des festins. Et lui ? Il était seul, immobile, dans le
froid. Le lendemain matin, les enfants revinrent voir Flocon. Ils le trouvèrent
triste, une larme gelée roulant sur sa joue. « Que se passe-t-il, Flocon ? »
demanda Léo. « J’aimerais tant participer à vos fêtes, sentir la chaleur du feu,
goûter au chocolat chaud et rire avec vous, » murmura-t-il. Touchés, Amélia,
Léo et Mahée promirent de l’aider. « Si on le faisait entrer dans une maison ?
» proposa Mahée. Ils construisirent un chariot en bois qu’ils recouvrirent de
blocs de glace pour garder Flocon au frais. Avec beaucoup d’efforts, ils le
firent glisser jusqu’à la porte de chez Léo. Mais à peine l’avaient-ils fait entrer
qu’une goutte d’eau perla sur le bras de Flocon. « Oh non, je commence à
fondre ! » s’écria-t-il. Les enfants, paniqués, le ramenèrent dehors. Ils
essayèrent ensuite de l’installer près de la cheminée éteinte dans une autre
maison, mais la chaleur ambiante était trop forte. Flocon perdit son sourire. «
Peut-être que je n’ai pas ma place ici, » dit-il tristement. « Ne dis pas ça, »
répondit Amélia. « Tu es unique, Flocon. Nous trouverons une solution. »
Soudain, Flocon aperçut un vieil homme qui avançait lentement, tête
baissée, sur la place enneigée. Ses pas laissaient de profondes empreintes
dans la neige immaculée. Le bonhomme de neige sentit une étrange chaleur
dans son cœur glacé. « Pourquoi ne pas l’inviter à se joindre à nous ? »
demanda-t-il avec douceur. Les enfants se regardèrent, puis un sourire éclaira
leurs visages. « Et si nous déplacions la fête ici, dehors, sous les étoiles ? »
s’écria Amélia. Ils coururent prévenir leurs familles et leurs voisins. Peu à peu,
les lumières des maisons s’éteignirent, et les habitants sortirent, curieux de
voir ce qui se passait. On apporta des lanternes scintillantes, des guirlandes
dorées, et même des plats fumants pour réchauffer les cœurs. Les enfants
jouèrent à des batailles de boules de neige, les adultes entonnèrent des
chants de Noël, et la place entière se transforma en un théâtre de rires et de
joie. Flocon, entouré de visages rayonnants, sentit une paix qu’il n’avait jamais
connue. « Je comprends maintenant, » murmura-t-il, ses yeux brillants comme
les étoiles. « Ce n’est pas la chaleur d’un feu qui réchauffe le plus, mais celle
de l’amitié et des moments partagés. Ma place est ici, sous le ciel ouvert, pour
apporter la joie à tous ceux qui viennent à ma rencontre. »
La magie de cette nuit exceptionnelle dépassa les frontières du village. On
raconte que les étoiles scintillèrent plus fort que jamais, comme pour saluer ce
moment unique d’unité et de joie. Flocon, au cœur de cette fête improvisée,
sentit une chaleur qu’il n’avait jamais imaginée. Entouré d’amis, de rires et de
chants, il comprit enfin qu’il avait toujours eu une place, même lorsqu’il
l’ignorait. « Chacun de nous a un rôle à jouer, » dit-il doucement, « même
quand on ne s’en rend pas compte. Moi, je suis ici pour rassembler, pour
rappeler que le bonheur naît du partage. »
Dès lors, Flocon devint plus qu’un simple bonhomme de neige : il devint le
symbole vivant de l’esprit de Noël. Chaque année, les habitants se
réunissaient autour de lui sous un ciel illuminé de mille étoiles, célébrant
l’importance d’être ensemble et de se réchauffer par l’amour et l’amitié. La
lumière qui entourait Flocon ne s’éteignit jamais, car elle était alimentée par la
chaleur des cœurs et des liens qu’il avait su créer.
Flocon ne fondit jamais, car, comme il aimait à le dire : « L’amour et l’amitié
sont plus puissants que toutes les flammes. Et même dans le froid, nous
avons tous une place où nous brillons. »
De Auns Darouaz