C’était la veille de Noël, à Procida. Le soleil déclinait sur l’île colorée. Les
maisons aux teintes rouges, bleues, jaunes et vertes, étaient radieuses. Dans les
rues pavées de pierres claires, les gens se hâtaient, un peu partout en lumière.
Tandis qu’un parfum de fleurs et de sel se mêlait, la mer chantait. Les vagues
fredonnaient des airs doux et légers. Dans ce décor couronné de magie, il y avait
un chien, un whippet, bien agité.
Will, le whippet, courait partout, sans jamais s’arrêter, bousculant, renversant
tout sur son passage. Rien ne pouvait le calmer vraiment !
Son pelage, moucheté d’un beige clair et sombre, étincelait au soleil. Sa queue
en virgule se balançait dans l’air, tandis que sa langue haletante volait. Il adorait
cette chaleur, ces doux rayons, et ne supportait pas l’idée d’un Noël sous la neige.
Will ne tenait pas en place, laissant des traces. Les fleurs des jardins décollaient
regagnant les nuages. Les chaises du café voltigeaient par terre. Pas le temps de
s’arrêter.
C’est alors que Pauline, une belle lapine, arriva, calme et souriante, en pianiste
divine. « Calme-toi, Will ! » S’écria-t-elle, lorsqu’elle constata le désordre, les
obstacles. Les instruments et les décorations étaient éparpillés.
Will préparait un grand concert, et tout excité, il ne savait comment s’y prendre.
« Je suis pressé, je dois courir, je dois m’y mettre ! Demain, c’est Noël ! Vite, vite,
il faut que ce soit prêt ! » Mais au fil de ses courses, des pots se sont brisés, des
guirlandes se sont emmêlées.
« Viens, Will ! » Dit Pauline avec sympathie. Elle savait ce qu’il fallait faire
maintenant. « Mon ami, il faut d’abord te poser, respirer profondément, sans
agitation. Essaie la posture du chien, tête en bas, et tu verras, tout deviendra plus
calme. »
Elle lui montra alors cette posture bien spéciale. Will, curieux, s’arrêta enfin. Puis
il suivit les conseils de Pauline. Les pattes bien plantées, les fesses élevées, Will
essaya. Mais son corps était tout raide. Il voulait courir. Tout en se laissant guider
par Pauline, petit à petit, il sentit son cœur plus tranquille, d’un calme fragile.
C’est alors que les oiseaux s’arrêtèrent pour l’observer. Les poissons dans l’eau
cessèrent de nager. Et Brou-brou, le chat au pelage chocolat, arriva stupéfait.
Tandis qu’il déposa ses tambours, il s’exclama « Que se passe-t-il mes amis ? Tout
est sens dessus dessous ! »
La douce lapine expliqua avoir retrouvé un Will tout fou, qui ne s’arrêta pas de
courir par ici, par là. Brou-brou, de son regard noir, affirma « Maintenant, tu dois
faire comme moi, le chat. Un dos rond, tout souple. »
Will le regarda, épaté. Il imita le chat, sans se presser, ses pattes avant tendues,
le dos bien cambré. Petit à petit, il sentit la paix grandir. Le vent de veille de Noël
allait le faire frémir.
« Bravo, Will ! » dit Brou-Brou, pendant que la dernière complice s’installa.
Madame Perruche à collier, tout en plume coloré, était prête à chanter de sa voix
cristalline, pour apaiser les âmes : « Cher Will, pour relâcher tes tensions, fais des
respirations, avec beaucoup d’attention. »
Elle lui expliqua de souffler doucement, comme si l’air s’échappait lentement.
« Imagine un vent léger, qui souffle tout autour. Inspire profondément, et expire
sans détour. »
Will ferma les yeux. Ses poumons se remplirent d’air joyeusement. Et tout à
coup, il se sentit apaisé, prêt à jouer. « Maintenant, mon ami, nous avons un
concert à préparer ! Il est temps de jouer ! »
Tous les amis se mirent en place : Pauline au piano, Brou-Brou aux tambours,
Madame Perruche à collier disposée à jouer de sa voix. Will, enfin calme, sourit,
clarinette en main.
Les lampions brillaient sous la lune claire. Les vagues murmuraient un son léger.
Et les amis s’élancèrent dans des notes vibrantes.
Les animaux s’avancèrent sur le sable, ceux de la mer, écoutaient aussi. Et les
habitants de l’île, arrivèrent devant eux, pour écouter le concert.
Will, dans un calme intérieur, put enfin observer, leurs yeux scintillaient, remplis
de magie, de vie. Il comprit alors, en les observant, que c’était le calme, et non la
course, qui faisait les cieux, que la magie de Noël se trouvait en eux, dans la paix,
la musique, et les rêves merveilleux.
Ainsi, sur l’île de Procida, tranquillement, la magie de Noël arriva. Pendant qu’ils
jouaient en harmonie, le cœur léger, remplis d’espérance, l’amour flottait partout,
comme une douce fortune.
La nuit les enveloppa d’un voile, le concert continua jusqu’à ce que la cloche de
minuit sonne. Will et ses amis fermèrent les yeux en paix. Ils s’endormirent là. Les
étoiles filaient, les vagues dansaient. Et la magie de Noël se répandait.
De Sara K’Millo