Parler de la lenteur semble également être un grand défi dans les écoles. Un défi que Gianfranco Zavalloni, pédagogue et directeur d’école, auteur de nombreux ouvrages sur l’environnement et le temps scolaire, relève en élaborant sa “Pédagogie de l’escargot”. Un éloge de la lenteur pour prendre conscience qu’il faut ralentir pour profiter des choses les plus simples et les plus naturelles de la vie.
Rousseau dans l’Emile disait qu'” Il faut savoir perdre du temps pour en gagner “, affirmant que tout ce qui nous semble être une perte de temps est au contraire un moyen de favoriser l’apprentissage ou le développement des enfants.
Lorsque nous sollicitons un enfant en lui disant de se dépêcher, nous violons son droit de faire selon son propre temps d’apprentissage, nous lui enlevons le temps d’apprendre, un temps qui lui est propre, qui lui appartient.
Faisant sienne la pensée du grand philosophe et pédagogue d’origine suisse, Zavalloni soutient que le secret de l’apprentissage réside dans le fait de savoir ralentir, à l’école, mais aussi en famille, dans la vie quotidienne. Avant tout, “perdre du temps” à parler et à écouter sont les prémisses indispensables au développement d’une relation éducative correcte entre enseignant et élève, entre parents et enfants. Il ne faut pas
être pressé à l’école, mais donner aux élèves la possibilité de s’épanouir dans le respect de leurs propres rythmes, manières et temps d’apprentissage. Zavalloni élabore ainsi un certain nombre de stratégies d’enseignement du ralentissement qui visent à respecter et à mettre en valeur le caractère unique de chaque enfant, remettant ainsi en question les pratiques éducatives traditionnelles. Au centre se trouvent l’écoute et le dialogue avec les élèves, surtout pendant les premières années d’école, qui sont les plus importantes et les plus formatrices d’un point de vue personnel et relationnel.
Dans un monde où les enfants sont déjà capables d’organiser leur vie avec des téléphones portables et où la technologie a pris le dessus sur les jeux traditionnels, les relations et les études, il est important de faire de la place pour un apprentissage pratique basé sur l’expérience : écouter de la musique, les témoignages des personnes âgées, sortir, apprendre par le toucher, jouer, jardiner…
Ainsi, en 1994, Zavalloni a publié le “Manifeste des droits naturels des garçons et des filles“, une sélection de droits qui devraient être garantis à chaque enfant afin qu’il puisse apprendre avec le temps nécessaire, le temps dont il a besoin pour grandir.
Parmi ces droits, le premier est le droit à l’oisiveté, c’est-à-dire le droit de vivre des moments non prévus par les adultes, et le droit à l’ennui, temps pendant lequel on ne fait rien.
Ce serait bien si chaque école avait une affiche avec les 10 droits énumérés à l’entrée !
1. DROIT À L’OISIVETÉ
droit de vivre des moments de temps non programmé par les adultes;
2. DROIT DE SE SALIR
droit de jouer avec le sable, la terre, l’herbe, les feuilles, l’eau, les cailloux, les branchages;
3. DROIT AUX ODEURS
droit de percevoir le goût des odeurs, reconnaître les parfums qu’offre la nature;
4. DROIT AU DIALOGUE
droit d’être écouté et de prendre la parole, intervenir et discuter;
5. DROIT À L’USAGE DES MAINS
droit de planter des clous, scier et poncer du bois, polir, coller, modeler de la pâte d’argile, nouer des cordes, allumer un feu;
6. DROIT DE PARTIR DU BON PIED
droit de manger une nourriture saine dès la naissance, de boire de l’eau claire et respirer de l’air pur;
7. DROIT À LA RUE
droit de jouer librement sur les places, de marcher dans la rue;
8. DROIT À LA VIE SAUVAGE
droit de construire un refuge dans les bois, d’avoir des roseaux où se cacher et des arbres sur lesquels grimper;
9. DROIT AU SILENCE
droit d’écouter le souffle du vent, le chant des oiseaux, le gargouillis de l’eau;
10. DROIT AUX NUANCES DE COULEURS
droit d’assister au lever et au coucher du soleil, d’admirer, la nuit, la lune et les
étoiles.